Chaque dimanche, le directeur adjoint en chef de informationsÉric Grenier, vous invite à lire (ou relire) son infolettre Miroir l’un des reportages les plus importants de la riche histoire du magazine. Vous pourrez ainsi replonger au cœur de certaines problématiques du passé, avec la perspective d’aujourd’hui.
Au moment où vous lirez ce bulletin, je serai déjà de retour après avoir fait un reportage quelques jours auparavant, dans une région éloignée des grands centres. Et suffisamment isolé pour que même si un Premier ministre démissionnait, je ne m’en apercevrais presque pas… Un reportage que vous pouvez lire et voir dans notre numéro de septembre, publié le 1est en août prochain.
L’endroit d’où je reviens n’est pas à la porte, mais pas autant que dans le coin de pays qu’a exploré mon collègue à la retraite Luc Chartrand, un voyage dont il nous parle dans « Le blues de la taïga », l’article publié cette semaine par Le Rétroisseur. Il y a 26 ans, Luc parcourait le nord-est du Québec en empruntant un chemin qui flirte avec le diable : exactement 666 km de long et sans pitié pour les imprudents. Un enfer de solitude infesté de mouches noires, où rôdent les bêtes les plus féroces du Québec, et où le consommateur affamé doit sacrifier le sandwich à 22 $ (en 1998 piastres, ce qui équivaut à 38 $ en 2024 !).
La route Transtaïga traverse le territoire d’Eeyou Istchee d’ouest en est, jusqu’aux terres des Naskapis et des Innus. Tournez à droite en quittant l’autoroute Billy-Diamond (anciennement connue sous le nom d’autoroute de la Baie James). après Wemindji, qui couvre à son tour un espace vide de présence humaine à 620 km de Matagami. Un parcours dans lequel il n’y a qu’une seule station-service, la Roadhouse au km 381 (la seule à 381 km de la précédente et à 240 km de la suivante).
Beaucoup de choses ont changé depuis ce rapport. Premièrement, le caribou. Omniprésent dans l’histoire de Luke, il est désormais rare, sans être un fantôme, après l’effondrement des populations. Le troupeau de la rivière aux Feuilles, en particulier, constitue déjà l’une des plus grandes concentrations d’animaux sauvages au monde : en 2001, 650 000 animaux migrateurs ont été recensés. Il en reste à peine un quart. Un effondrement qui est dû à la fois au cycle naturel de ces immenses troupeaux et à d’autres phénomènes moins naturels, comme le braconnage et la dégradation de leur écosystème. Ainsi, depuis 2012, toute l’industrie de la chasse sportive au wapiti (dont la viande a une saveur exceptionnelle) s’est également effondrée avec l’interdiction de cette activité de chasse. La chasse n’est autorisée qu’aux membres des nations crie, naskapie et innue.
La toponymie a également changé. Comme mentionné ci-dessus, la route de la Baie James s’appelle désormais la route Billy-Diamond, en hommage à un grand chef cri décédé en 2010.
Aussi, on ne dit plus Baie-James, mais Eeyou Istchee. Ce qui atteste d’un autre grand changement politique : la constitution d’un véritable gouvernement autochtone, en 2012, héritage de la Paix des Braves, un traité négocié entre le premier ministre du Québec, Bernard Landry, et le chef cri, Ted Moses, dix ans auparavant. .
Et entre autres choses qui ne sont plus ce qu’elles étaient, c’est le vocabulaire, qui en 26 ans a évolué pour mieux tenir compte de la réalité historique des premiers peuples. Ne blâmez pas le journaliste de 1998.
Bonne lecture !
Éric Grenier, rédacteur en chef adjoint
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