Au large de la Pointe du raz, dans le Finistère, l’île de Sein est la commune française la plus décorée au titre de la Seconde Guerre mondiale. En ce 84e anniversaire de l’appel du 18 juin, elle constitue la deuxième étape de commémoration du président Emmanuel Macron, après le Mont-Valérien dans la matinée. Si Charles de Gaulle, Jacques Chirac ou François Hollande s’y sont déjà rendus, parfois à plusieurs reprises, Emmanuel Macron y arrive, quant à lui, pour la première fois.
Cette visite présidentielle, sur ce petit rocher de la mer d’Iroise, est actée depuis plus d’un an. Selon l’Élysée, la cérémonie sera très simple: un dépôt de gerbe est prévu près du monument dédié aux Forces françaises libres (FFL), suivi d’un discours prononcé par le président de la République. Les habitants interpréteront également un cantique, Le Libera, en mémoire de ces citoyens ayant joué un rôle majeur pour la France libre.
Sein, « le quart de la France ! »
Juin 1940. Alors que des combats aériens se déroulent au-dessus de Sein, ses habitants apprennent la chute de Rennes puis celle de Brest. Les communications sont mauvaises. L’île reçoit avec beaucoup de retard les informations du continent en provenance de la mer ou des rares TSF (téléphériques sans fils). Ils entendent ce fameux appel du 18 juin, alors lancé depuis Londres par un général inconnu, seulement quatre jours plus tard le 22 juin.
Sur le continent, les maires des communes diffusent les menaces allemandes de réquisition des citoyens âgés de 18 à 60 ans. Au courant, des Sénans amarrent cinq bateaux disponibles et prennent la direction de l’Angleterre pour rejoindre le chef de la France libre, Charles de Gaulle. À leur bord : 128 hommes âgés de 14 à 54 ans. Fraîchement débarqués, ils sont invités à rejoindre le Palais des expositions de l’Olympia, à Londres, au côté de 300 volontaires. Surpris par le nombre de Bretons, le général de Gaulle aurait dit en leur serrant la main : « l’île de Sein, c’est donc le quart de la France ! »
« Courageuse île bretonne »
Ces hommes sont appelés à combattre au sein des Forces navales françaises et chez les fusiliers marins. Sur les 128 mobilisés, 18 n’auront pas la chance de revenir sur leur chère île une fois la libération des terres, le 4 août 1944. En visite sur l’île, Charles de Gaulle lui attribue deux ans après la Croix de la Libération, le 30 août 1946. « Il y aura toujours, maintenant, en France des gens qui penseront à l’île de Sein, avait alors souligné Charles de Gaulle. La France entière saura qu’il y avait sur l’océan une bonne et courageuse île bretonne dont l’exemple magnifique deviendra légendaire. »
Cette décoration s’est accompagnée de deux autres récompenses : la Croix de guerre 1939-1945 et le statut de ville « Compagnons de la Libération », faisant de l’île l’une des cinq communes françaises dotées de cette dernière distinction, au côté de Paris, Nantes, Grenoble et Vassieux-en-Vercors. L’île de Sein est alors devenue la commune la plus décorée au titre de la Seconde Guerre mondiale et aura reçu la visite des cinq présidents de la Ve République. Tous auront posé les yeux sur son monument aux morts, sur lequel figure l’inscription bretonne « Kentoc’h Mervel » : plutôt mourir.