La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a lourdement condamné mardi la Russie pour sa loi sur les « organisations indésirables » promulguée en 2015, qui entraîne d’importantes restrictions pour les organisations visées et les personnes physiques impliquées dans leurs activités.

Au total, la Russie est condamnée à verser plusieurs centaines de milliers d’euros à quatre associations et à environ 80 requérants individuels, parmi lesquels l’opposant emprisonné Vladimir Kara-Murza.

La CEDH, basée à Strasbourg, rappelle d’ailleurs que le Comité des ministres du Conseil de l’Europe « continue de surveiller l’exécution des arrêts de la Cour rendus contre la Russie et que celle-ci est tenue de les exécuter ».

Moscou a été exclu du Conseil de l’Europe en septembre 2022, après l’invasion de l’Ukraine, mais la Russie reste en principe comptable des violations de la Convention européenne des droits de l’homme commises jusqu’à cette date.

Dans l’arrêt rendu mardi, la Cour note que la loi sur les organisations indésirables « entraîne d’importantes restrictions pour l’organisation concernée »: celle-ci ne peut pas avoir de bureaux, de comptes bancaires ni mener des projets en Russie, et l’accès à son site internet depuis la Russie est restreint.

« Application de la loi imprévisible »

La CEDH souligne que la loi incriminée n’est pas assez précise concernant les comportements répréhensibles des ONG et note « l’emploi de termes vagues et imprécis pour définir les motifs pouvant justifier la qualification d’indésirable ».

« Ces insuffisances ont rendu l’application de la loi imprévisible », souligne la CEDH.

« La Cour juge que les dispositions légales relatives aux +organisations indésirables+ n’étaient pas formulées avec une précision suffisante pour permettre aux organisations requérantes de prévoir que leurs actions, normalement légales, aboutiraient à leur qualification d’+indésirables+ et à l’interdiction de leurs activités en Russie », juge la cour européenne.

En outre, « les recours en justice engagés par les requérants n’offraient pas de garanties adéquates contre le pouvoir discrétionnaire, presque illimité, qui est reconnu aux autorités exécutives en la matière ».

Par conséquent, la Russie a violé les articles de la Convention européenne des droits de l’homme relatifs à la liberté d’association et à la liberté d’expression.

« Nous nous réjouissons de cette décision qui nous donne raison, ainsi qu’à d’autres organisations similaires qui ont été injustement prises pour cible par les autorités russes », a salué dans un communiqué Nils Muiznieks, président de l’Association des écoles d’études politiques du Conseil de l’Europe, une des quatre associations requérantes.

« Bien que la Russie ne soit plus membre du Conseil de l’Europe, cet arrêt envoie un signal fort aux autres gouvernements et pourrait servir de repère, parmi d’autres, pour la Russie si elle souhaite réintégrer la communauté démocratique des nations. »



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